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LBS-CRIAEAU : Réflexions sur le colloque génocide des Tutsi à Limoges ESPE par Centre Mémoire Oradour-sur-Glane

Juste un essai, de " résumé " ( qui n'engage que moi et ne reflétera pas la REALITE exacte du colloque ) avec quelques réflexions  " à chaud " , dans la mémoire vive...Mais le colloque a été filmé et les vidéos seront mises en ligne sur le site du Centre de la Mémoire d'Oradour-sur-Glane.

Tout d'abord : " une grande tenue " : je m'étais préparé " au pire ", dans le sens où, entre les querelles françaises et les formes de négation de chercheurs par d'autres chercheurs...., susceptibilités et traumatismes en la recherche même ...Que donc le Centre de la Mémoire d'Oradour organise un tel colloque ....et bien....était déjà très bien.

( Rencontre d'un prof hist-géo avant le colloque : témoignage de cours et réflexions des élèves de 3ème : place de l'implication française ) 

La situation mondiale est - relativement - exécrable et, aborder la phénoménologie du génocide des Tutsi depuis Oradour/Glane, en une ESPE de Limoges ( formations des "maîtres" ex-IUFM) ....C'est difficile et courageux.

D'ailleurs ce furent les premiers mots du colloque.

Et puis l'évidence, rapide : les survivant(e)s, leurs témoignages, "calment" " tout le monde ", invitent et obligent - au sens humain du terme - à davantage d'humanité. Et ceci, c'est "du gain pour tout le monde".

La présence des survivants, leurs voix, leurs corps, leurs regards, leurs mots et langues, leur humanité : recevoir le témoignage : apprendre encore : Ecouter : essayer de comprendre. Penser. Réfléchir. C'est " tout " . C'est DEJA beaucoup. Le reste ? les restes de "bla bla " de tentatives intellos ? Oui, bien sûr, pourquoi pas : si on a bien conscience de cette modestie nécessaire, de ces essais, de penser, de dire, de réfléchir, de faire des propositions...D'ailleurs je pourrais essayer de synthétiser , au regard du Criaeau, ces interventions, mais il semble préférable de d'abord, et déjà, essayer de résumer, tout en gardant l'Humain.

Le colloque commença jeudi soir par une forme de triple tour de table avec les 3 survivants, Jean RUZINDAZA , Emilienne MUKANSORO, Laurent RUTINDUKA ( prêtre) et Pierre Galinié " le français présent au moment du génocide " avec sa compagne Tutsi : introduit par Audoin-Rouzeau et Hélène Dumas, simplement présenté et " désirant se taire pour laisser la parole aux survivant(e)s", avec une proposition de méthodologie rappelant " qu'il n'était pas obligatoire de témoigner " : sous -entendu : c'est très difficile.

Donc triple tour de table : 1 ) premier souvenir des premières persécutions 2 ) souvenir de 1990 à 1994 3 ) Souvenir de pendant les 3 mois du génocide.

Bon : je ne vais pas résumé les témoignages : il sera possible de les voir en ligne, les écouter. Juste une remarque : c'est uniquement par les témoignages que l'on apprend : chaque histoire, chaque parcours de survivant(e), est " unique " et donne à apprendre, essayer de comprendre , l'histoire des survivants et l'histoire du génocide. Au bout de 10 ans " à temps plein " , d'études de témoignages et sur l'histoire du génocide, j'ai le sentiment profond, de " ne rien savoir " : chaque témoignage compose le REEL de cette Histoire : de l'Humain à l'Histoire collective : on en saura jamais assez. Les deuils, l'effort des survivant(e)s donne aussi à entendre cette " limite" : "si on peut en apprendre encore " ...c'est bien : mais c'est tellement difficile.

Aussi la réflexion de Jean : il a remercié les organisateurs-trices et le public, d'avoir créer cet espace de parole : même si lui, justement, au second tour, n'a pas désiré parler tout de suite.  Dans l'épreuve de témoigner, la difficulté, et bien, aussi, le possible de savoir que l'Autre entend, écoute, apprend : la double présence, " survivants-public " en une écoute réciproque, une attention réciproque : et même difficile, dure, la production d'échange humain qui donnent à sentir le Bien : le nécessaire : on pourrait se résigner, à ne pas témoigner, à ne pas apprendre des survivants : mais pourtant, au-delà de la difficulté réciproque, au-delà de l'épreuve, dure : ça a l'air d'être par là .....

Emilienne en a témoigné en son parcours au moment où elle a assumé d'aider les enfants orphelins survivants : écouter : pas besoin de dire: ECOUTER L'AUTRE. 

Laurent et son parcours de prêtre....politique car combattant pour la Justice.

Pierre et " ses demi-tours en voiture " échappant avec sa compagne Tutsi à la mort dans des situations où le cinéma est pauvre...donnant à entendre ce que " la France " eut de comportement terrible....

La force des témoignages, quand, au-delà des premières études, ils sont toujours précisions, détails, uniques, pièces du puzzle " infini" , multitude de nuances, de situations de comportements, en situation extrêmes, récits d'une réelle survie...C'est à dire, une conscience unique contre la criminogénie déshumaine, d'un tueur et ou d'un groupe de tueurs - ou tueuses ) , d'une possibilité de garder l'Humain, même par chance, même par inconscience, vivant, " au-delà des tueurs génocidaires ", "au-delà de la mort présente partout, à chaque seconde " : mais ....le POIDS DES DEUILS : ici , pas seulement la complexité des deuils, leurs " résolutions " et ou les différents niveaux de résiliences : le poids des deuils, de la famille, des proches, en ce qu'ils réactivent de la fragilité de l'Humain, en ce qu'ils forcent aux souvenirs des morts, en ce qu'ils renomment des liens familiaux, sociaux, de l'Amour, des êtres chers encore " présents" dans l'acte de témoigner : l'acte de témoigner ( tel peut-être Rwanda 94 une tentative de réparations POUR LES MORTS à l'usage des Vivants du Groupov ) tel l'acte de présence aux défunts, à l'amour encore présent du survivant pour la famille, les proches, " au-delà même presque de ce que fut l'horreur de la déshumanisation dans le génocide " : évoquer papa, le mari, les parents, les cousins, les enfants, au-delà des souillures et abominations....Je ne sais pas. 

Témoigner, c'est rester entre les morts et les vivants : c'est rester au milieu du fleuve entre les morts et les vivants : les deux ont leur importance première. Le survivant , en témoignant, ne peut et ne doit pas choisir: c'est une épreuve permanente, extrêmement difficile.

On demande presque de " vérifier " : pas la peine de témoigner si trop difficile. Et puis, dans l'épreuve, " après l'épreuve " du témoigner .....peut-être se dire que, c'est BIEN de témoigner : pour les morts et les vivants : l'impression que " tout le monde en a besoin " : en une démonstration par l'absurde, se taire, ce qui est Humain aussi ...est possible. Mais, pour celles et ceux qui le peuvent, TEMOIGNER : "ça nous rapproche en Humains, malgré l'horreur des faits et crimes, malgré la déshumanisation, malgré les deuils ..."

D'ailleurs Stéphane Audouin-Rouzeau " conclut " ce triple tour de table par ..une réflexion ouverte sur le témoignage et la difficulté de témoigner, très humblement.

J'ai pensé par ailleurs, tout en ayant appris de nombreux témoignages, qu'il fallait encore apprendre : c'est très difficile, très dur : on pleure, on craque : il existe une forme non de masochisme, non de devoir non plus : mais on apprend : on essaie peut-être de " refaire corps " avec le survivant, la survivante : mettre des mots, des regards, sur l'indicible, l'impartageable, l'inhumain, l’innommable...seulement déjà ça...

On veut bien faire, apprendre...or déjà : écouter : s'écouter entre humains.

Humains "traumatisés" , humains pas prêts, humains devant l'écocide, humains imparfaits, humains prétentieux, humains...aussi humains ....peut-être essayant d'être , un peu ...davantage humains.

Or donc, les mots ....pas les bons, ou inappropriés..ou inexacts....trompeurs ou faisant illusions un temps....

La colère aussi, contre le déshumain en l'Humain : notre impuissance encore ....mais aussi, quelques silences...quelques " petits mots" ..on ne sait ...on s’essaie encore, et malgré tout, à l'Humain....

Prêtre, femme, français, "responsable CNLG ", avec des " chercheurs", " spécialistes "..." public " : mêmes les " étiquettes " ne correspondent pas vraiment : des Humains, en 2019, 75 ans après la Shoah, 25 ans après une récidive de génocide au Rwanda...où la France fut compromise...devant l'écocide.

C'est trop difficile pour des êtres humains. Et pourtant..c'est la réalité.

Bon : j'arrête : je me tais.

Je reprendrais demain.

 

En fait, ce colloque a " tout remis " en question sur " mon livre ", sur mes prétentions à essayer, vraiment, de produire une réflexion : comme si le Témoignage, déjà .....

La fragilité des interprétations des constructions intellectuelles : où l'on sait pourtant, leur nécessité : pour " progresser " en les savoirs, en fait, tel que Jean l'a éminemment rappelé : EN LA PREVENTION .

Bien à toutes et tous.

Laurent Beaufils-Seyam , écrit à Boussac, le vendredi 24 mai 2019 à 22 heures 50 minutes...

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